Le Spiritisme devant la science

From The Arthur Conan Doyle Encyclopedia

Le Spiritisme devant la science (Spiritualism and Science) is a French article written by Pierre Guitet-Vauquelin published in Floréal on 7 january 1922.

The article is explaining how spirit photography should be analysed by real neutral scientific experts. It gives the example of Arthur Conan Doyle photo with the spirit of his supposedly son. Included is an ACD letter where he explained how the photo was taken.


Le Spiritisme devant la science

Floréal (7 january 1922, p. 6)
Floréal (7 january 1922, p. 7)

Comme il fallait s'y attendre, notre dernier article à propos du beau livre de M. Paul Heuzé, Les Morts vivent-ils? a soulevé quelque émotion parmi les spirites, voire même parmi les métapsychistes, quoique ces derniers se montrent plus réservés. On nous reproche notre exigence de voir les expériences se renouveler, enfin, dans des laboratoires officiels, dans des conditions de sécurité et de loyauté telles que l'évidence s'impose et que ce soit notre scepticisme qui fasse désormais figure de parti-pris ou de mauvaise foi. Des hommes, dans l'honnêteté desquels j'ai, personnellement la plus absolue confiance, m'objectent que les conditions mêmes d'expérimentation que Paul Heuzé leur propose, et que nous sommes ici tout à fait enclins à leur imposer, risquent de mettre les médiums dans l'impossibilité totale de produire les phénomènes utiles. Ils font appel à la tradition de tout occultisme, qui exige, de la part des spectateurs, un respect, une crédulité, qui ne contrarient point la manifestation des forces obscures, soit sous leur forme idéifique pure, — télépathie de vivant à vivant, ou de mort à vivant, — soit sous leur forme matérielle ou semi-matérielle, percussions et apparitions. Comme le fait Conan Doyle, dans la Nouvelle Révélation qui, nous ne craignons pas de le dire, nous paraît plus imaginative que toute la série des Sherlock Holmes, ils évoquent les rigueurs soi-disant expérimentales des plus réputés des thaumaturges du passé. En présence d'« hommes de peu de foi », Jésus-Christ lui-même se refusait à accomplir des miracles. Et les spirites d'affirmer: il s'y refusait, parce que les incrédules annihilaient bel et bien sa merveilleuse médiumnité. C'est fâcheux à l'extrême, car une telle carence du pouvoir médiumnique condamne le spiritisme à être exclu ou presque du cycle des sciences exactes. C'est d'autant plus fâcheux, même, qu'une contemplation de plus de vingt années des phénomènes spirites et métapsychistes courants, nous a fourni un pourcentage de près de quatre-vingt pour cent de supercherie et de charlatanisme avéré, de la part des médiums, et d'une jobardise décevante de la part de leurs sectateurs. Jamais, dans les séances, de lévitation, les expérimentateurs n'ont accepté nos offres de contrôle, d'un contrôle pourtant bonhomme comme le glissement d'un contact électrique sous l'objet prétendu soulevé sans contact. Lorsque, usant d'une violence courtoise, nous avons forcé la consigne, nous avons surpris, comme l'indiquent les photos ci-jointes, des trucages qui eussent exaspéré des gens moins patients que nous, moins ardents que nous à accepter les preuves de toute espèce de vérité nouvelle : cheveux habilement reliés aux objets, jambes conjuguées actionnant les pieds (les tables, détente des articulations simulant des percussions, et, dans ce dernier ordre de phénomène, nous avons connu un berger des Alpilles qui produisait, par une remarquable dislocation des omoplates, des bruits nets qui paraissaient à s'y méprendre, résonner dans l'une des cloisons de la pièce ou nous nous trouvions. Je découvris le pot-aux-roses en logeant un témoin dans la pièce contiguë, l'oreille collée à la cloison, et qui ne perçut rien de rien, et le froissement musculaire ou osseux du pauvre diable fut arrêté net en substituant une piqûre de morphine à la quotidienne piqûre de cacodylate qu'exigeaient ses fièvres paludéennes. Il avoua alors. Après de tels à-coups, vous ne vous étonnerez pas que nous fassions preuve d'une certaine exigence, voire d'une exigence critique certaine. Nous avons fréquenté des maisons hantées. Et, ici, nous le reconnaissons de bonne grâce, nous demeurons perplexes. Notre critique a été mise en défaut. Nous n'avons pu découvrir aucun agent normal, et force nous est bien de ne pas nous inscrire en faux contre les théories chères à M. Bozzano et que ne repousse pas M. Maxwell. Mais, que l'explication en est troublante ! Mes maisons, vous dit-on, conservent intactes les images de ceux qui les habitèrent, même après leur mort, et non seulement des personnes humaines, mais des animaux qui y vécurent et qui y sont morts, ce qui, d'après les croyances spirites impliquerait la survivance du psychisme du chien, du cheval ou du chat, et, porterait à nos religions « officielles » la botte mortelle. Est-il bien nécessaire d'adopter ici la foi dans la survie du principe psychique ? Nous ne le pensons pas. Tout se résume pour nous à la mémoire, et nous ne sommes pas éloignés de croire, un peu comme les métapsychistes, à la faculté idéo-plastique de la mémoire. Il vous est arrivé, comme à moi, de voir se dresser devant vous le souvenir d'une image visuelle, de la contempler connue une chose tangible qui, dans la durée de quelques secondes, s'éloigne de vous et finit par se diluer dans l'espace non point par fragmentation, mais par éloignement ; et, peut-être, vous est-il advenu, comme à nous-mêmes, de tendre la main vers cette image, — disons vers ce fantôme en somme ectoplastique, — et d'éprouver nettement une sensation tactile. Mais je le répète, je ne ressens nullement le besoin de faire intervenir « les morts, les pauvres morts », et je me satisfais amplement d'interférences, de répercussions des souvenirs semi-matériellement projetables, de vivant à vivant. Le grand mystères, c'est la mémoire, aussi la solidarité des mémoires individuelles. Et vous m'accorderez que, si nous établissons enfin scientifiquement cet interprétation des individus, nous ferons faire à l'idéal de paix, de concorde, d'alliance totale dans le quotidien effort des hommes, des peuples et des races un pas de géant que tous les mythes et tous les dogmes, pour si respectables et séduisants qu'ils soient, ne sauraint réaliser. Mais une fois encore nos recherches, à nous, se circonscrivent dans le domaine de la physiologie et du psychisme normaux. Le sublinnial, dans son sens dogmatique spirite, nous indiffère. Le laboratoire, le laboratoire, le laboratoire ! tel est notre cri de ralliement, qui est celui de notre lucide et loyal camarade Paul Heuzé. Par probité, nous donnons ici la photographie du grand romancier anglais Conan Doyle avec, auprès de lui, l'apparition de son fils décédé. Mais nous signalons que des experts photographes ont cru reconnaître dans la photographie du fantôme el grain d'une photographie antérieure. Supercherie, Conan Doyle invitus ? Pas nécessairement. Je suis prêt à admettre la projection idée-plastique de cette photo antérieure par Conan Doyle lui-même. Mais je spécifie bien que je suis prêt à l'admettre, et que je ne l'admettrai comme un fait décisif que du jour où semblable phenoinène sera renouvelé en Sorbonne, dans un laboratoire impeccable, expérience que dirigeront des savants respectés, et à laquelle ni Paul Heuzé, ni moi-même, profanes en somme, nous ne demanderons d'assister. Nous comptons parmi nos maîtres, des expérimentateurs tels que nous nous méfions infiniment plus des hallucinations possibles de nos sens que des leurs. Et nunc, sub judice lis est.

Pierre GUITET-VAUQUELIN.


TRADUCTION DE LA LETTRE DE CONAN DOYLE

Cette photographie a été prise par le Cercle spirite Crewe sous l'influence des médiums M. Hope et Mme Buxton. La plaque achetée par moi à Manchester. Aussitôt arrivé dans le studio de M Hope. J'ouvris le paquet dans l'obscurité et plaçai la plaque dans l'appareil, non sans avoir examiné, au préalable, l'appareil et les lentilles. On me photographia, les deux médiums étendant les mains au-dessus de l'appareil. J'emportai alors celui-ci dans une chambre noire, sortis la plaque, la développai, la fixai et la lavai, et je puis voir, avant de quitter la chambre noire, une autre tête sur la plaque. Aucune main, sauf la mienne, n'avait touché cette plaque.

En examinant avec une puissante lentille le visage ainsi apparu, je constatai qu'il semblait avoir été obtenu par le procédé photographique des journaux. Il est très possible que la photo, qui n'a d'ailleurs pas une ressemblance frappante avec mon fils, ait été introduite dans la plaque d'après une photo existante. Quoi qu'il en soit, ce fait est tout à fait surnaturel, puisqu'il n'est dû à aucune manipulation ni fraude.

A. CONAN DOYLE