Rosalie Williams

From The Arthur Conan Doyle Encyclopedia
Rosalie Williams as Mrs. Hudson in The Naval Treaty (1984)
Rosalie Williams as Mrs. Hudson in Shoscombe Old Place (1991)

Rosalie Williams (12 june 1919 - 11 december 2009) was a British actress famous for her role of Mrs. Hudson in the TV series Sherlock Holmes with Jeremy Brett as Sherlock Holmes.

Twenty years earlier, in 1965, she played John of Hordle's mother on radio in The White Company.



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Biography

Les temps héroïques

Comment imaginer que la paisible Mrs Hudson ait été, en son temps, une jeune contestataire, aspirant à révolutionner la société ?

Et pourtant... Pendant les années quarante, Rosalie Williams, l'inoubliable propriétaire du 221B, Baker Street, dans la série Sherlock Holmes de Granada, était aux antipodes du conformisme victorien. Tandis que ses parents, un couple de professeurs aisés, avaient quitté l'Europe en guerre pour les USA, Rosalie demeura seule à Manchester. Elle faisait alors partie de la compagnie Theatre Union, fondée en 1936 dans le but de rendre le théâtre accessible aux classes populaires, jusque-là exclues. Elle hébergea dans sa demeure du 5, Manor Road, devenue quartier général de la troupe, plusieurs de ses membres, dont Ewan MacColl et Joan Littlewood. Cette dernière, travaillant à la BBC, qui devait plus tard la licencier en raison de ses sympathies communistes, contribuait à subvenir aux besoins du groupe, tout comme Rosalie, qui partageait avec ses amis les colis venus d'Amérique. En 1945, la compagnie Theatre Union fut dissoute et Joan Littlewood, Ewan MacColl, Gerry Raffles, Howard Goorney et Rosalie Williams fondèrent le Theatre Workshop, dont Joan Littlewood prit la tête. Unie par des idées politiques d'extrême gauche, la compagnie était révolutionnaire non seulement au niveau politique, mais aussi à celui de son fonctionnement interne et de ses choix artistiques. Il fut décidé en effet qu'aucun des acteurs n'aurait, dans la troupe, le statut de star et que tous toucheraient le même salaire. Quant aux spectacles, ils aborderaient sans tabou les problèmes contemporains, et leur mise en scène, résolument novatrice, ferait fi des conventions. On utiliserait tous les progrès de l'éclairage et du son, et on inclurait dans les représentations musique, danse et improvisation. La troupe du Theatre Workshop vécut d'abord dans un grand dénuement, que son enthousiasme et son idéalisme juvénile lui permirent d'endurer stoïquement. Après des tournées aussi épuisantes que peu lucratives dans toute la Grande-Bretagne, elle trouva finalement refuge au Théâtre Royal de Stratford East qui, en dépit de son nom, n'avait rien d'un palais. C'est le Français Claude Planchon, directeur du Festival International de Paris qui, en 1955, permit à la compagnie de Joan Littlewood d'être enfin reconnue, en l'invitant pour représenter l'Angleterre. La troupe interpréta le Volpone de Ben Johnson et remporta un grand succès. Mais le plus extraordinaire était à venir.

Rosalie Williams dans A Taste of Honey (1958)

En 1958, le Theatre Workshop représenta à Stratford East une pièce où Rosalie Williams jouait le rôle d'une infirmière et qui souleva une tempête de controverses : A Taste of Honey (Un Goût de miel), oeuvre provocante de Selagh Delaney, une jeune fille de dix-neuf ans issue d'un milieu défavorisé et sans aucune formation d'écrivain. La pièce, défiant tabous et convenances, contait l'histoire d'une adolescente affligée d'une mère irresponsable et d'un beau-père alcoolique, mise enceinte par un marin noir et aidée par un étudiant gay à prendre soin de son enfant. Certains critiques éreintèrent la pièce, un kitchen sink drama (drame d'évier de cuisine), en taxant l'auteur d'amateurisme et de mauvais goût. Mais d'autres, comme celui du Times, la portèrent aux nues, car ils voyaient en Joan Littlewood la mère d'un théâtre nouveau, moderne et tonique. John Osborne tira de l'oeuvre de Selagh Delaney un film qui portait le même titre et obtint un Oscar. Il fallait désormais compter avec Joan Littlewood, l'iconoclaste et la provocatrice qui avait osé appeler la Royal Shakespeare Company et le National Theatre The Walking Dead (Les morts vivants). En 1963, le Theatre Workshop devait triompher en remportant le grand prix du Festival avec une pièce satirique très audacieuse : Oh !What a lovely war !


Rosalie Williams et le Library Theatre

Au Theatre Workshop, Rosalie avait rencontré David Scase (1919-2003), qu'elle épousa et dont elle eut quatre enfants. Issu du milieu ouvrier, Scase avait tout d'abord travaillé en usine et dans la marine. Il devint ensuite ingénieur du son à la BBC et, plus tard, rejoignit le Theatre Workshop en tant que régisseur, puis metteur en scène. De 1954 à 1966 et de 1969 à 1983, il dirigea le Library Theatre (actuellement rebaptisé HOME Manchester) et en fit un des plus prestigieux théâtres de répertoire. A partir de 1970, il se lança également avec succès dans une carrière d'acteur (c'est lui qui, dans The Master Blackmailer, incarne le propriétaire de la galerie d'art et dans The Cardboard Box, le vieux marin). Il n'est pas aisé de répertorier les rôles joués par Rosalie au Library Theatre, dont les archives omettent le plus souvent d'indiquer le casting. On sait toutefois qu'en 1954, elle incarna Desdémone dans Othello aux côtés de Jeremy Brett, qui jouait Cassio, et qu'en 1957, elle fit partie de la distribution de l'émouvante pièce de Tennessee Williams, The Glass Menagerie. L'année suivante, elle fut Mrs Twigg dans la comédie de J. B. Priestley, Mr Kettle and Mrs Moon. Elle semble également avoir été chargée de la chorégraphie dans Brer Rabbit (1959) et The Beaux Stratagem (1960). Mais l'activité théâtrale de Rosalie Williams ne se cantonna pas au Library Theatre. Le journal Gadsden Times, par exemple, mentionne en 1974 sa présence au Gadsden Civic Theatre dans une comédie intitulée Butterflies are free (Les Papillons sont libres), qui remporta un franc succès.

Rosalie à l'écran

Tout comme Jeremy Brett, David Burke et Edward Hardwicke, Rosalie Williams a également beaucoup travaillé pour la télévision. En 1961, elle est apparue dans The Younger Generation (rôle de Mrs Sayers), une série destinée à donner leur chance à de jeunes scénaristes et de jeunes acteurs. En 1965, elle fut Mrs Pearson dans la série policière réputée Z Cars. Au cours des années 70, elle figura successivement dans la distribution de Holly (1972, rôle : Mrs Mattingly), de Crown Court, The Age of Leo Trotsky (1973, rôle : Mrs Brandon), de Blind Love (1977, rôle : Mrs Foster) et de The Dick Francis Thriller, The Racing Game (1979). Pendant les années 80, elle apparut dans Decision by committee (1980), Kiss me Quick (1981, rôle : Mrs Crimmins), Juliet Bravo, Arlene (1981), How we used to live (1984), The Jewel in the Crown, The Towers of Silence (1984, rôle : Sister Mary), Brookside (1987), et Beiderbecke Connection, Oh Look ! It's average sized Trevor Chaplin (1988). Enfin, dans les années 90, Rosalie Williams incarnera la Baroness of Delicacy et Gran'Ma Morkie dans la série Truckers (1992), Lily dans le téléfilm Dancing Queen (1993) et Mary Payton dans Casualty. Mais c'est le rôle de la discrète et loyale Berthe dans Hedda Gabler avec Diana Riggs (1983, video) et surtout celui de Mary dans la série à succès Flambards (1980, video), qui préfigurent le mieux son futur personnage de Mrs Hudson. En effet, Mary travaille dur, en servante dévouée. Mais elle a aussi du caractère, de la fougue et, en dépit de son statut de simple domestique, à mesure que le temps passe, elle compte de plus en plus pour sa maîtresse Christina, qui se bat pour maintenir seule le domaine à flot pendant la première guerre mondiale...

Une irrésistible Mrs Hudson

Rosalie Williams (Mrs. Hudson) dans The Empty House (1986)
Rosalie Williams (Mrs. Hudson) dans The Naval Treaty (1984)

Avant de lancer la série, Michael Cox entreprit de repenser le personnage de Mrs Hudson tout comme il l'avait fait de celui de Watson. Plutôt qu'une marionnette burlesque, ne pouvait-on faire d'elle un personnage complet, celui d'une logeuse qui, ayant loué un appartement à un formidable excentrique, a appris à accepter ses exigences hors du commun et fini par éprouver envers lui une affection pareille à celle que lui inspirerait un petit garnement turbulent? Le problème était de trouver une actrice qui soit à la fois capable de remplir le rôle et susceptible d'accepter de n'apparaître que quelques minutes dans les épisodes où elle figurerait. Heureusement, Rosalie Williams connaissait à la fois Jeremy Brett, avec qui elle avait joué au Library Theatre dans les années 50, et Michael Cox, qui y avait été assistant régisseur à la même époque. Elle accepta donc le rôle en souvenir du bon vieux temps.

Loin d'être un épisode insignifiant dans la carrière de Rosalie Williams, sa participation à la série Sherlock Holmes contribua de manière décisive à sa notoriété, car toutes les notices qui la concernent affirment : principalement connue pour son rôle de Mrs Hudson. D'après ses déclarations au Scarlet Street Magazine (No. 21, hiver 1996), elle en tira également beaucoup de plaisir : Jouer Mrs Hudson me manque. Mrs Hudson me manque vraiment énormément. Une fois que j'étais sur le plateau, j'étais elle, et c'était mon salon et tout devait être exactement tel qu'il était. Je me glissais en elle avec beaucoup de facilité et beaucoup de plaisir. Et je n'ai jamais été une Holmésienne ! Je veux dire que je ne suis pas du tout membre d'un fan club ! Mais j'ai vraiment aimé jouer ce rôle en tant qu'actrice.

La présence de Rosalie Williams fut aussi un atout pour la série, et non des moindres, car elle se révéla une Mrs Hudson particulièrement attachante, dont l'impact sur les spectateurs fut sans commune mesure avec son temps de présence à l'écran. Digne, parfois même imposante en dépit de sa petite taille, la logeuse se montre capable de tenir discrètement mais efficacement tête à Holmes au nom de la solidarité féminine dans The Solitary Cyclist et de lui manifester sa vibrante indignation dans Le Détective agonisant, lorsqu'il explique les ruses auxquelles il a recouru pour paraître à l'article de la mort. Elle défie même ouvertement le grand détective au cours de la séquence mémorable de l'aspidistra (The Cardboard Box) où, à sa question furibonde : Mrs Hudson, how do you dare to take my aspidistra ? (Mme Hudson, comment osez-vous prendre mon aspidistra ?), elle réplique par un impérial : I do dare (J'ose, vraiment.) Mais la Mrs Hudson de Rosalie Williams n'a rien d'une virago. Pleine d'une expérience et d'une sagesse qui sont loin de se borner au domaine pratique, elle connaît et tolère avec indulgence la puérilité des hommes (Cf l'entretien avec Mrs Whitney dans The Man with the Twisted Lip) et discerne les sentiments que son infernal locataire n'avouerait pour rien au monde : s'il dénigre les compétences professionnelles de Watson absent, lui fait-elle observer finement dans The Golden Pince-Nez, c'est parce que le docteur lui manque. Mrs Hudson est comique lorsqu'elle partage les terreurs hystériques et infondées de Mrs Warren, sa collègue logeuse (The Red Circle) ou chasse comme un garnement malfaisant l'athlétique boxeur Steve Dixie, coupable du chaos qui règne dans le salon de Holmes (The Three Gables). Mais elle est aussi très humaine et infiniment touchante quand, croyant Holmes à l'agonie, elle trottine le long des rues, éperdue, à la recherche du Docteur Watson, aussi vite que le lui permet son âge (The Dying Detective) ou quand elle borde affectueusement Holmes blessé (The Illustrious Client). Les apparitions de cette Mrs Hudson à la fois pleine de bon sens et de caractère, maternelle et drôle, sont toujours appréciées. Et quand elle est absente d'un épisode, elle nous manque.

Elle manquait également à Jeremy Brett, qui exprima à David Stuart Davies son regret de ne pas la voir figurer dans The Last Vampyre : il était triste qu'il n'y ait pas de Mme Hudson dans cette histoire. Il appréciait toujours la présence de Rosalie Williams ; il l'aimait beaucoup. C'est la seule femme avec laquelle j'aie une relation régulière en tant que Holmes, disait-il. Elle lui manquait tant et si bien, qu'il insista pour qu'elle soit présente dans les six épisodes des Mémoires, et son voeu fut exaucé.

Entre les deux acteurs, l'amitié était réelle et profonde, comme en témoigne l'interview donnée par Rosalie Williams au magazine Scarlett Street un an après le décès de Brett : Ah, mais quelle perte. Une terrible perte pour le théâtre ! Et une perte personnelle, car c'était pour moi un ami très proche et très cher. Pas seulement un partenaire de travail. Vous en venez à connaître quelqu'un très, très bien, quand vous êtes dans une loge avec lui. [...] Nous avions travaillé ensemble au théâtre, quand nous étions tous les deux beaucoup plus jeunes, et c'était quelqu'un d'adorable. Il avait une voix merveilleuse et une très forte présence sur scène. Il était si généreux avec tout le monde. [...] Ce qu'il faisait avec mon rôle, je l'appelle de la broderie. Il avait l'habitude de broder pour moi sur mon rôle ! En fait, il y a très peu de choses dans le texte réel concernant Mrs Hudson et il avait l'habitude de suggérer de charmantes petites inventions, de petites séquences, comme lorsqu'il me donne une fleur dans un épisode (The Naval Treaty). Il y avait plein de moments comme celui-là, où Holmes révélait combien Mrs Hudson était proche de lui. Ce qui ne figure pas dans les histoires, mais c'est une chose qui s'est établie parce que c'était Jeremy et moi ! Nous devions cependant faire attention, car si nous avions dépassé les bornes, les Holmésiens ne l'auraient pas accepté. Il y a eu quelques critiques, quand il m'a offert la fleur, mais il a toujours agi avec un vrai panache holmésien. Avec perspicacité. Toujours avec un clin d'œil. Je pouvais échanger un coup d'oeil avec lui, toujours.

Rosalie exprime le chagrin que lui inspire la mort prématurée de son partenaire avec des mots spontanés, simples et sans apprêt, qui sonnent parfaitement juste et vrai : En vérité, mon sentiment est que cela n'aurait jamais dû arriver. Nous ne savons pas quelles erreurs ont été commises en cours de route ni ce qui s'est passé, mais c'était un personnage extraordinaire et un bel homme ! Il était tellement beau. C'est désolant qu'il ait été si malade à la fin de la série. Son visage a gonflé à cause de certains des médicaments qu'il prenait et ça lui a enlevé les beaux traits aquilins qu'il avait en tant que Sherlock Holmes. Mais derrière, la vérité était toujours là. Pour moi, il n'a jamais rien fait qui soit en désaccord avec le personnage. Quelquefois, il surjouait un tout petit peu, quand il était fatigué. [...] J'ai réellement été très, très triste au sujet de Jeremy. De temps en temps, ça me revient, et les larmes me viennent aux yeux, vraiment...

Bien sûr, il ne faut pas confondre la personne de l'acteur et le rôle qu'il interprète. Mais, comme le dit Holmes dans The Dying Detective : la meilleure façon de bien jouer un personnage, c'est de l'être. Alors, qui mieux que Rosalie Williams pouvait jouer le rôle de la logeuse parfois à bon droit grondeuse, excédée ou révoltée, mais profondément maternelle, du Sherlock Holmes qu'incarnait Jeremy Brett ?






  • Credits : Monique Claisse (text). Sarah Fava (photos). A Study in Celluloïd (Michaël Cox), Bending the Willow (David Stuart Davies), Scarlet Street Magazine (Winter 1996), Oxford DNB article: Theatre Workshop, Home Manchester (ex Library Theatre), jeremybrett.info